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Comprendre

Métamorphoses de l'épidémiologie

Hélène Frouard

Sciences Humaines N° 327 - Juillet 2020

Médecins, infirmiers, biologistes… et épidémiologistes. Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, les épidémiologistes ont été placés sur le devant de la scène. Grâce à la puissance de leurs modèles mathématiques, ces professionnels mal connus participent activement à la lutte contre cette maladie nouvelle.

30 000 lits de réanimation ? 100 000 lits ? En mars dernier, l’épidémie de Covid-19 explose en France. Les responsables des hôpitaux suivent anxieusement les prévisions élaborées quotidiennement par les épidémiologistes. Rapidement, ces derniers sont placés sous le feu des projecteurs. Des expressions comme « porteur sain » ou « immunité de groupe » entrent dans notre vocabulaire. Tous, nous découvrons les subtilités d’une discipline mal connue, l’épidémiologie. Celle-ci a pourtant une longue et riche histoire. On en trouve les prémices dès l’Antiquité, explique Joël Coste, médecin et historien de la médecine : « Dans le corpus hippocratique, qui réunit des textes rédigés aux 5e et 4e siècles avant notre ère, les livres des “Épidémies” témoignent de bonnes connaissances sur l’aspect collectif des maladies. » Les Grecs, précise l’historien, associent avec finesse certaines pathologies aux conditions climatiques ou géographiques. C’est le cas du paludisme observé dans les zones marécageuses, ou de nombreuses maladies respiratoires et digestives dont le cycle suit celui des saisons.

Enregistrer les morts

Pour comprendre plus précisément ces épidémies meurtrières, il faut toutefois des données précises, notamment le nombre de victimes. En Europe, certains pays se mettent à enregistrer naissances et décès à partir du 16e siècle. Dès le 17e siècle, la ville de Londres y ajoute « le détail des maladies et accidents » qui ont causé la mort. Voilà qui permet à l’anglais John Graunt (1620-1674) de mesurer pour la première fois les pics de mortalité dus aux épidémies (1).

Mais les premiers vrais succès de l’épidémiologie datent du 19e siècle – le mot est d’ailleurs forgé à cette période. C’est l’époque du chemin de fer, du bateau à vapeur et de la réfrigération : le premier navire à chambre froide (et à voiles) prend la mer en 1876. D’où une circulation accrue des hommes, des marchandises, et avec eux des « maladies pestilentielles » : choléra, fièvre jaune ou « peste d’Orient » (2). Parallèlement, on assiste à une « avalanche de chiffres » sans précédent, pour reprendre l’expression de l’épistémologue Ian Hacking. Brillance des étoiles, taille moyenne des conscrits ou nombre de morts : tout se mesure. Se développe alors une véritable science des maladies, fondée sur un croisement astucieux entre les données chiffrées de la mortalité et les enquêtes de terrain. L’une des plus célèbres est celle de John Snow à Londres (encadré ci-dessous). Comme le notent les historiennes Anne Hardy et Eileen Magnelo dans un dossier spécial de Sozial und Präventivmedizin, cette première épidémiologie est une science fondée sur l’observation, qui utilise des méthodes statistiques assez simples et fait usage de beaucoup de bon sens (3). Elle permet au final de faire progresser le savoir scientifique et d’affiner les stratégies de lutte contre les épidémies, généralement attribuées aux « miasmes » qui flottent dans l’air. À Bombay par exemple, un violent épisode de peste éclate en 1896. L’administration parvient à localiser les foyers épidémiques, situés dans des quartiers vétustes, et lance des travaux d’assainissement pour y remédier (4).

La Belle au bois dormant

À la fin du 19e siècle, grâce notamment aux travaux de Pasteur, Eberth ou Koch, il est enfin prouvé que les maladies infectieuses sont provoquées non pas par l’environnement, la mauvaise qualité de l’air ou la pauvreté mais par de minuscules êtres vivants, les microbes (nos actuels virus et bactéries). La bactériologie devient alors le bras armé de la lutte contre les épidémies : ne suffit-il pas d’isoler le germe responsable, et de protéger les populations par une vaccination comme on sait le faire pour la variole depuis des siècles ? Peu à peu, des maladies comme la diphtérie, la rage ou la fièvre typhoïde cèdent du terrain. « L’épidémiologie connaît alors une éclipse relative, explique l’historien Luc Berlivet, elle est menacée de devenir une science subalterne, ancillaire. » Au début du 20e siècle, l’un de ses spécialistes, William Hamer, la comparera même à la Belle au bois dormant, victime du sortilège jeté par la bactériologie (5). Mais certaines maladies ne livrent pas si facilement leur secret. C’est le cas de la rougeole, dont le virus ne sera découvert qu’en 1954 et le vaccin mis au point dans les années 1960. De plus, la bactériologie a bien du mal à expliquer pourquoi les épidémies naissent ici plutôt qu’ailleurs, telle année plutôt que telle autre, et tuent les uns plus que les autres. Des questions particulièrement aiguës lors de la très grave pandémie de grippe espagnole, une grippe H1N1 qui meurtrit le monde en 1918-1919. Transmise par un virus à l’époque inconnu, elle témoigne brutalement des limites de la microbiologie et vient ainsi déstabiliser le modèle bactériologique, explique Joël Coste.

Le théorème du moustique

Pour comprendre la dimension collective des maladies, l’épidémiologie a donc encore de beaux jours devant elle. Une nouvelle génération de chercheurs en est convaincue. Délaissant les rives du Gange ou les taudis londoniens, ils empruntent désormais leurs outils aux mathématiciens et aux démographes. Comme l’explique l’un d’eux, Major Greenwood, cité par l’historienne Olga Amsterdamska, les maladies sont comme des villes : on peut les découvrir en marchant dans la rue et en étudiant leurs monuments les plus illustres, ou bien par une vision globale, en survolant la cité en aéroplane (6). C’est ce que fait notamment Ronald Ross. Né dans les Indes britanniques en 1857, il a le premier compris que le paludisme (la « malaria » des Anglais) est transmis par des insectes, les anophèles : la découverte lui vaut un prix Nobel en 1902. En 1911, il établit ce qu’on appelle le « théorème du moustique ». Dans son article, paru dans la revue Nature, il démontre par de simples calculs qu’il suffit de faire baisser la concentration d’anophèles en dessous d’un seuil critique pour arrêter la progression de la maladie. Ses collègues Major Greenwood et William Topley choisissent pour leur part la voie de l’expérimentation animale en provoquant artificiellement des épidémies dans des groupes de souris de laboratoire. En faisant varier la proportion de rongeurs immunisés présents dans chaque groupe, ils observent qu’en dessous d’une certaine masse critique d’individus susceptibles de tomber malades, l’épidémie se tarit. On retrouve le même type de recherche dans les travaux des mathématiciens William Kermack et Anderson McKendrick. Jusqu’ici, rappellent-ils en introduction de l’article paru en 1927 dans les Proceedings of the Royal Society, on pensait que les épidémies s’arrêtaient naturellement lorsque toute la population était touchée, ou que l’agent infectieux perdait de sa virulence. Ils infirment ces théories en construisant des modèles théoriques. Ils calculent comment évolue la proportion des individus susceptibles de tomber malades, déjà infectés ou non concernés par la maladie, qu’ils soient morts ou immunisés, en fonction de certains facteurs comme la densité de population ou le taux de mortalité. Ils parviennent à prouver qu’une épidémie, en général, se termine avant que toutes les personnes susceptibles de contracter la maladie l’aient attrapée.

Ces raisonnements basés sur une compartimentation de la population en sous-groupes fondent ce qu’on appelle encore aujourd’hui le modèle SIR. Ils permettent de comprendre la dynamique des épidémies. Ce sont à eux que l’on doit par exemple la notion d’immunité de groupe dont on a tant parlé pour la Covid-19 – l’épidémie s’arrêtera probablement d’elle-même lorsque 60 % de la population aura été immunisée. Mais à l’époque, ces « châteaux de cartes mathématiques » sont peu accessibles aux contemporains : la maîtrise enjouée des calculs d’intégrales et des transformations de Laplace est un plaisir auquel s’adonnent peu de médecins.

Une science globalisée

Au tournant du 20e siècle, l’épidémiologie renforce aussi sa dimension internationale. Les États échangent leurs données dans ce domaine, et construisent des réseaux de surveillance. L’historienne Céline Paillette détaille : « Les conférences sanitaires internationales qui naissent en 1851 se pérennisent en 1907, avec la création de l’Office international de l’hygiène publique puis avec la Commission des épidémies créée en 1920 au sein de la Société des nations », l’OMS prenant le relais en 1947. Voilà qui permet d’harmoniser les pratiques – par exemple la durée de quarantaine des navires – mais aussi de collecter et d’échanger des données venant du monde entier. L’effort est facilité dès 1893 par une classification internationale des maladies, fondamentale pour homogénéiser les données. Elle continue aujourd’hui encore à représenter un maillon essentiel de la lutte épidémique : en avril 2020, l’OMS a publié un guide de codage des décès dus à la Covid-19 pour permettre l’agrégat des statistiques dans le monde entier. La discipline bénéficie aussi de positions solides dans le monde académique et s’institutionnalise, profitant de l’essor des politiques de santé publique notamment aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Aux États-Unis, souligne L. Berlivet, la philanthropie américaine, notamment la Rockefeller Foundation, « fait de la professionnalisation de la santé publique une de ses grandes priorités », contribuant à créer en 1916 l’École d’hygiène et de santé publique de l’université Johns-Hopkins – en 2020, les cartes quotidiennes d’évolution de la pandémie de Covid-19 produites par la Johns-Hopkins sont largement reprises par les grands journaux comme Le Monde. La Grande-Bretagne voit aussi émerger quelques grands pôles, notamment à la London School of Hygiene and Tropical Medicine, elle-même encore très active en 2020.

Le tabac dans le viseur

Après-guerre, notamment après le décès brutal de Franklin D. Roosevelt en 1945 (encadré ci-dessous), les épidémiologistes commencent à s’aventurer hors du domaine infectieux. Les maladies cardiovasculaires ou le cancer, par exemple, entrent dans leur orbite. Une expérience fondatrice est menée en Grande-Bretagne en 1947. Suite à une augmentation du nombre de cas de cancers du poumon, le Medical Resarch Council enquête auprès de divers patients, victimes ou non de cette affection. Tous sont interrogés sur leurs habitudes de vie (7). Les résultats sont sans appel : les victimes de cancers pulmonaires se distinguent des autres patients par leur plus forte consommation de tabac. Ces résultats sont confortés par une enquête prospective menée à partir de 1951 : 36 000 médecins sont suivis régulièrement. Dès 1954, au grand dam des marchands de cigarettes, l’étude prouve sans équivoque que le tabac est un cancérigène majeur pour l’homme. De son côté, le suivi de plusieurs milliers d’Américains permet de montrer le rôle du diabète et de l’hypertension dans les maladies cardiovascultaires (encadré ci-dessous). La nouvelle épidémiologie acquiert là ses titres de noblesse, non sans peine : « Dans les années 1950, souligne l’historien L. Berlivet, certains épidémiologistes se sont élevés contre le fait qu’on puisse parler d’épidémiologie pour autre chose que des maladies infectieuses. » Les réticences cèdent devant la puissance de cette nouvelle approche qui permet de mieux comprendre ces maladies dites « multifactorielles », et explorer leurs causes variées – génétiques, comportementales, sociales, etc. On parlera désormais d’épidémie de cancer, d’obésité, de diabète. Voilà qui devient la branche phare de l’épidémiologie, qui connaît alors ses « trente glorieuses » selon l’expression employée par le professeur Arnaud Fontanet dans sa leçon inaugurale au Collège de France en 2019. En France, en 2020, note J. Coste, « la très grande majorité des équipes de recherche en épidémiologie se consacre à ce type de travaux » – que ces spécialistes viennent de la biologie, de la médecine, de la pharmacie ou des mathématiques.

L’ombre de la chauve-souris

Bien que moins présente, l’épidémiologie des maladies infectieuses continue pour autant. Les recherches de modélisation « sont peu visibles mais se poursuivent », selon L. Berlivet. Par ailleurs, les dispositifs de surveillance s’améliorent : l’OMS met ainsi en place en 1947 un mécanisme de surveillance de la grippe. Reste, aussi, l’important travail mené par les épidémiologistes « en chaussures de cuir » : arpentant sans relâche l’Afrique, l’Amérique latine, l’Asie, ils repèrent sur le terrain les démarrages des épidémies et mettent en place des stratégies de lutte – non dénuées parfois d’arrière-pensées géostratégiques. En 1980, la terrible variole est ainsi la première maladie au monde officiellement éradiquée. Mais l’enthousiasme est de courte durée. Sida, Ebola, MERS-CoV : l’arrivée des maladies infectieuses émergentes, provenant souvent d’animaux, comme la chauve-souris, réveille l’inquiétude. « Avec ces nouveaux virus, explique L. Berlivet, on voit revenir sur le devant de la scène une épidémiologie des maladies infectieuses, avec une forte légitimité, qui renoue d’une certaine façon avec ce qui était pratiqué au 19e siècle ou dans l’entre-deux-guerres : recherche étiologique, travail de surveillance, traçage des réseaux de contacts des personnes infectées, etc. »

Une tradition toutefois renouvelée par d’importantes avancées théoriques. C’est le cas par exemple de la notion de R0, dont l’épidémiologiste et historien des sciences Hans Heesterbeek relatait l’histoire en 2002 dans la revue Acta Biotheoretica. Le R0 désigne le nombre moyen de personnes qu’infecte un malade. Présent de façon sous-jacente dans les travaux de l’entre-deux-guerres, il est formalisé en 1975 et est aujourd’hui une donnée centrale des modélisations épidémiologiques. Son calcul est également complexifié : lorsqu’il s’agit d’explorer l’épidémie de sida par exemple, il paraît vite absurde d'appréhender la population comme un ensemble homogène. Dès l’origine, par exemple, la communauté homosexuelle apparaît particulièrement touchée. D’où l’identification de sous-groupes de population. D’autres pistes sont explorées : recours à l’anthropologie pour mieux comprendre les façons dont les personnes se côtoient et s’infectent ; volonté d’observer les virus à l’échelle globale, en incluant les questions environnementales ou climatiques ; ou plus récemment utilisation des outils génétiques comme l’expliquait A. Fontanet lors de sa leçon inaugurale au Collège de France en 2019 : en 2017, des prélèvements du virus Ebola, effectués dans divers lieux lors de l’épidémie qui avait éclaté trois ans plus tôt, ont été repris. Le génome du virus a été séquencé : ses petites variations ont permis de construire un « arbre généalogique » du virus, et donc de reconstituer sa diffusion sur le terrain – la méthode a été récemment utilisée dans l’épidémie de Covid19  (8). Enfin, on développe depuis quelques années des modèles « multiagents » : plutôt que de réfléchir à partir de « compartiments » de population, on simule informatiquement les interactions de millions d’individus entre eux. Pour plus de réalisme, on ajoute parfois à l’ensemble une dose de hasard. L. Berlivet estime d’ailleurs qu’un des enjeux théoriques de l’actuelle épidémie est « de savoir si cette discipline va rester inscrite dans la tradition épidémiologiste classique, ou bien si elle va être transformée, y compris au plan institutionnel, par l’essor des datas sciences et de l’analyse des systèmes complexes ».

Les aléas des projections

Malgré leur finesse de plus en plus grande, les projections des épidémiologistes comportent nécessairement des marges d’erreur. C’est particulièrement vrai lorsque les maladies sont mal connues. Lors de la « maladie de la vache folle », qui débute en Grande-Bretagne en 1986, les premières estimations nationales du très honorable Imperial College étaient de 136 000 morts, rappelait A. Fontanet. La durée d’incubation était en effet inconnue. Une fois cette donnée améliorée, les modèles se sont montrés beaucoup plus proches du nombre réel de décès (177 morts). L’an dernier, une équipe a réalisé une analyse rétrospective des modèles utilisés lors de l’épidémie Ebola en 2014-2015 : elle a montré que ceux-ci étaient pertinents, mais seulement à très courte échelle, compte tenu des nombreuses inconnues (9). Les mêmes questions se posent pour la Covid-19, dont de nombreux aspects restent dans l’ombre : combien de temps dure l’incubation ? Peut-on transmettre la maladie en étant asymptomatique ? Les formes graves touchent-elles au hasard ou non ? Interviewé en mars dernier par la revue Science, l’épidémiologiste William Hanage, de Harvard, invitait les hommes politiques à prendre avec précaution des modèles qui reposent sur de nombreuses inconnues (10). C’est un peu, concluait-il, comme si on décidait de chevaucher un tigre sans savoir où il est, quelle taille il fait, ou même combien exactement de tigres on a à affronter...

D’autre part, les modèles dépendent pour beaucoup de la qualité des statistiques. Or celles-ci sont toujours complexes à construire. On l’a vu avec la lenteur mise à intégrer correctement le nombre de morts des Ehpad. Le problème se pose aussi pour les personnes décédées à domicile : les certificats de décès permettent-ils d’identifier avec certitude les causes de la mort en l’absence de test ? Enfin, certains pays peinent à tenir à jour ces comptabilités quotidiennes.

« Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles », aimait à plaisanter le statisticien George Box. Face aux projections de mars dernier, qui évaluaient jusqu'à 300 000 à 5 000 000 le nombre de morts en France en l’absence de mesures de prévention et d'endiguement, l'épidémiologue Simon Cauchemez concluait pour sa part : « S’il y a une situation où je serais heureux que les modèles se trompent, c’est celle-là (11). » 

John Snow

En 1854, une épidémie de choléra s’abat sur Londres. Le docteur John Snow soupçonne cette maladie d’être due à un « poison » circulant dans l’eau. Il se saisit d’une carte de Londres et reporte sur chaque immeuble le nombre de morts. Il note, aussi, la localisation des différentes pompes à eau et interroge des habitants sur leurs habitudes quotidiennes. Le croisement de ces différentes données lui permet de montrer que les cas de choléra sont associés à l’usage d’une des pompes à eau.


Center of Disease Control and Prevention, « Principles of epidemiology, third edition. Historical evolution of epidemiology », octobre 2006. www.cdc.gov/

Roosevelt est mort !

Le 12 avril 1945, le président Roosevelt s’écroule, victime d’une hémorragie cérébrale. Le pays est sous le choc. L’événement met en lumière de façon crue une évolution surprenante : dans les pays riches, les maladies cardiovasculaires sont devenues la première cause de mortalité dans le pays, détrônant les maladies infectieuses. En France par exemple, ces maladies cardiovasculaires tuent « seulement » 1 Français sur 10 en 1906. Elles en abattent 1 sur 5 en 1930, et pratiquement 1 sur 2 (40 %) en 1970 (12) ! L’épidémiologie trouve là un nouveau terrain. Car, qu’il s’agisse de choléra ou de cancer, la question posée reste la même qu’autrefois : comment une maladie se diffuse-t-elle au sein de la population ? Peut-on identifier les conditions qui expliquent sa progression ? Enquêtes de terrain et calculs statistiques sont mobilisés pour comprendre les causes de nouvelles maladies. Aux États-Unis, une enquête est ainsi lancée en 1948 dans la petite ville de Framingham. Des milliers d’habitants volontaires sont questionnés à intervalles réguliers sur leurs habitudes de vie et passent – volontairement – des examens médicaux. Les données recueillies permettent de montrer qu’il y a un lien statistique entre les problèmes cardiovasculaires et l’hypertension artérielle ou l’excès de cholestérol. Une nouvelle épidémiologie est en train de naître : il ne s’agit plus seulement d’étudier la trajectoire des maladies infectieuses, mais également les causes – biologiques, génétiques mais aussi sociales et comportementales – des maladies.

POUR ALLER PLUS LOIN…

  • « Histoire de l’épidémiologie des facteurs de risque »
    Dossier spécial, Revue d’histoire des sciences, 2011/2.
  • « History of epidemiology »
    Série spéciale, Sozial und Präventivmedizin, n° 46, 2001, et n° 47, 2002.
  • « Histoire de l’épidémiologie. Enjeux passés, présents et futurs »
    Comité pour l’histoire de l’Inserm, Les Cahiers du Comité pour l’histoire de l’Inserm, n° 1, 2020. www.ipubli.inserm.fr/
  • « Principles of epidemiology, third edition. Historical evolution of epidemiology »
    Center for Disease Control and Prevention (www.cdc.gov), octobre 2006.
  • « Épidémiologie »
    Luc Berlivet, in Didier Fassin et Boris Hauray, Santé publique. L’état des savoirs, La Découverte, 2010.
  • De Galton à Rothman. Les grands textes de l’épidémiologie au 20e siècle
    Alain Leplège, Philippe Bizouarn et Joël Coste, Hermann, 2011.

 

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